174279

(2004) Astérion 2.

Les charniers en Bosnie-Herzégovine

Les crimes contre les survivants

Amor Masovic

Amor Masovic, responsable de la commission de recherche des disparus en Bosnie-Herzégovine et ancien responsable de la commission pour l’échange des prisonniers pendant la guerre de 1992-1995, nous présente ensuite un tableau accablant des disparitions dans les guerres récentes en ex-Yougoslavie, et des pratiques pour faire en sorte que ceux-ci ne soient ni retrouvés ni, encore moins, identifiés (d’où des fosses communes de deux types : « primaires » –  où les corps furent enterrés initialement – et « secondaires » – où ces mêmes corps furent ré-enterrés, souvent démembrés, après avoir été déterrés pour être dispersés et moins aisés à repérer). 28 000 des 40 000 disparus ex-Yougoslaves relèvent du conflit en Bosnie et sont à 95 % des civils protégés par les conventions de Genève. Sur les 280 charniers identifiés la plupart se trouvaient à l’arrière et non sur le front et les disparitions sont datables à des périodes de non-combat. Le but de la commission est donc d’abord de retrouver et identifier les morts pour « faire savoir » et permettre le deuil (puisque la barbarisation qui a été exercée est double : contre les victimes et contre leurs familles qui ne peuvent « vivre » tant qu’elles n’ont pas de certitude). En outre, faute de disposition légale et d’une absence de droit spécifique des disparus personne ne peut être incriminé pour une disparition devant le TPIY où les « disparus » ne sont donc pas représentés. Amor Masovic tire quatre conclusions de son exposé : 1) la barbarie exprimée aujourd’hui est pour partie un résultat des manques de la justice à l’égard des crimes de guerre de la seconde guerre mondiale ; 2) la guerre contre les civils augmente en même temps qu’augmentent les dispositions internationales contre ces exactions qui restent donc purement formelles ; 3) en Bosnie, la barbarisation s’est exercée sur les corps des victimes de façon redoublée puisque l’anéantissement des preuves du crime fait que la mort n’est pas une vraie fin. D’où une forme particulière de barbarisation d’après-guerre ; 4) seul élément plus « positif » : en Bosnie des échanges de prisonniers eurent lieu pendant la guerre sans attendre la fin du conflit ce qui est rarissime et va au-delà des exigences posées par les conventions de Genève en matière de libération des prisonniers.

Publication details

DOI: 10.4000/asterion.90

Full citation:

Masovic, A. (). Les charniers en Bosnie-Herzégovine: Les crimes contre les survivants. Astérion 2, pp. n/a.

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